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P’tit dej’ de l’info du 2 mars 2023 : pandémie et travail social, une crise (seulement) sanitaire ?

Les p’tits dej’ de l’info sont des rendez-vous trimestriels co-organisés par la Caf du Rhône et la Fédération des centres sociaux du Rhône, qui s’adressent à tous les professionnel.le.s et administrateurs.trices des centres sociaux. Il s’agit d’un temps fort pour notre réseau, au cours duquel un.e intervenant.e apporte un éclairage sur les transformations sociales et sur les enjeux sociétaux qui questionnent et impactent le fonctionnement des centres sociaux.

Le jeudi 2 mars 2023, le 1er p’tit déj’ de l’info de l’année a abordé le lien entre la pandémie et le travail social, appréhendé différemment par chaque corps de métier. Amélie Derobert, maîtresse de conférences en science éducative et formation à l’Université Lyon 2, est revenue sur la façon dont cette crise a amplifié des enjeux sociaux préexistants, mais aussi comment elle a bousculé certaines pratiques professionnelles.

Réécoutez l’intervention d’Amélie Derobert :

 

On a pu observer deux étapes dans la gestion de la crise : au départ tout était sous contrôle par le biais des comportements individuels. Mais le confinement généralisé a changé les mécanismes : des problématiques économiques, sociales et sécuritaires ont émergé et/ou se sont amplifiées. Les plus précaires en ont été les premières victimes, que ce soit au niveau sanitaire (surpopulation dans les logements), économique (matériel pour télétravailler), social (manque de connaissance du numérique) et territorial (manque de transport et isolement).

Comment les professionnel.le.s ont-ils.elles agi dans ce contexte ?

Concernant les acteurs sanitaires, ils n’ont pas eu d’autre choix que de s’aligner, mettant de côté des problèmes déjà existants (conditions de travail, sous-effectif). Lorsque certain.e.s professionnel.le.s ont préféré ne pas prendre de risques, d’autres sont parti.e.s sur le terrain afin d’agir en urgence face à la situation. Le travail s’est digitalisé très rapidement en France, en l’absence de procédures officielles : les professionnel.le.s se sont organisé.e.s et adapté.e.s à cette nouvelle pratique à leur échelle. Dans l’urgence, une auto-organisation s’est formée entre collègues pour que tout soit bien réceptionné avec l’utilisation de nouveaux outils comme les groupes WhatsApp par exemple. Une inquiétude s’est tout de même posée quant à la confidentialité de toutes ces données.

La pandémie a été considérée comme une inconnue qui a suscité créativité, ajustement des professionnel.le.s et mise en œuvre de pratiques non institutionnelles. Derrière tout cela, les problématiques du travail social présentes en amont ont été mises entre parenthèse. Mais à la fin du confinement, les tensions sont ressorties et n’ont pas été réduites. Une pandémie peut être un coup d’arrêt, mais aussi un révélateur des problèmes plus généraux d’un secteur.

Les participant.e.s ont pu exprimer leur ressenti, appuyer les propos d’Amélie Derobert et surtout se questionner quant aux enjeux futurs. Même si la vie a repris son cours, les professionnel.le.s notent des changements apparus depuis la pandémie qui semblent désormais ancrés dans les pratiques.

Le confinement a révélé un sentiment de non-reconnaissance et d’invisibilisation du travail effectué par les métiers en tension dans le champ d’action des centres sociaux. La complémentarité des professionnel.le.s et leur réorganisation ont fait évoluer leur posture au cours de cette période. On est passé d’une logique individuelle à une obligation de repenser l’action au sein des structures. Les prescrits de travail ont volé en éclats, ce qui a permis une marge d’innovation et de liberté et a d’ailleurs eu des répercussions positives sur les territoires. Le retour à la normale fait émerger des besoins, des diagnostics préoccupants. Il questionne également les moyens attribués. Des hémorragies se sont créés au sein des équipes en post-confinement : sensation d’avoir perdu ce qui avait été inventé durant la crise, volonté de retrouver ce qui a été vécu.

Quid de la capitalisation sur la créativité mise en avant lors de cette période ?

Certain.e.s professionnel.le.s ressentent une forme de pression à devoir « rattraper » le temps, qui n’a pourtant pas été perdu mais modelé différemment. Un constat global est partagé par l’ensemble des participant.e.s : il y a un manque de recul, d’écrits collectifs sur cette période. Cette crise a mis en exergue un changement de paradigme dans le travail social : le caractère d’adaptabilité est devenu prioritaire dans un projet. L’enjeu de veille est plus essentiel que jamais pour évoluer dans un contexte instable.

 

Retour en images et en vidéo sur cette matinée :

 

Bibliographie

  • Achard, C. (2022). Le travail social en France au défi de la crise sanitaire : Ruptures, permanences et (dis)continuités. Écrire le social, 4, 54-65. https://doi.org/10.3917/esra.004.0054
  • Bourque & Avenel (2020). Pandémie et travail social au Québec et en France. Intervention, Hors-série n°1
  • Gilbert C (Dir.). Risques collectifs et situations de crise. Apports de la recherche en sciences humaines et sociales. L’Harmattan, 340 p., 2003. ⟨halshs-00290256⟩
  • Gaille, M. ; Terral ; Askenazy, P ; & alLes sciences humaines et sociales face à la première vague de la pandémie de Covid-19 -Enjeux et formes de la recherche. [Rapport de recherche] Centre National de la Recherche Scientifique ; Université Toulouse III – Paul Sabatier. 2020. halshs-03036192v2
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